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ACTE DEUXIÈME

Dans son amour, elle brise le phare
Qui t’éloignait de moi !

TRISTAN.

Ô jour, ô lumière implacable,
Que ne puis-je étouffer ton éclat, à mon tour ;
Que ne puis-je venger les tourments, qu’à l’amour,
Inflige sans pitié ta haine redoutable. —
Est-il, au fond de l’âme, une seule douleur
Que ne réveille ta lueur ?
Même la nuit, tu ne veux faire grâce,
Jusqu’au seuil de l’amour, ta clarté nous menace.

YSEULT.

N’était-ce pas son éclat orgueilleux,
Qui rayonnait dans l’éclair de tes yeux,
Lorsqu’au nom de ton vieux monarque,
Tristan, tu vins solliciter ma main ? —
Qui t’avait inspiré cet infâme dessein
De me jeter aux bras de Marke ? —
Cruel ami, ne le savais-tu pas,
C’était me vouer au trépas !

TRISTAN.

Hélas ! aurais-je pu te dire,
Le secret de mon fol amour,
À toi, maîtresse d’un empire,
Trônant au milieu de ta cour ? —
Courbant le front devant ta gloire,
N’osant lever les yeux vers toi,
Comment pouvais-je croire
Qu’Yseult serait à moi ?

YSEULT.

N’avais-tu pas déjà mon âme ? —