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action dont toutes les parties constituantes réunies donnent l’impression de cette vie même, de façon que tout spectateur croie participer à cette action. Au contraire, le musicien néglige absolument les circonstances matérielles de la vie, en laisse de côté les contingences, les cas particuliers, pour n’en extraire que les éléments essentiels, selon sa propre sensibilité intime, laquelle précisément ne peut se manifester de façon concrète que par la musique. Un poète véritablement doué de sens musical aurait donc fourni à Berlioz cette même scène sous une forme idéale parfaitement concrète ; un Shakespeare la livrant à un Berlioz, afin qu’il la reproduise en musique, aurait fait subir à sa réalisation poétique des modifications. Et ces modifications seraient équivalentes à celles qui, introduites par Berlioz dans son œuvre, rendraient celle-ci pleinement intelligible. Mais nous venons de considérer ici une des plus heureuses inspirations du génial compositeur. Mon opinion sur d’autres pages moins heureuses me ferait volontiers réprouver de pareilles tendances, si nous ne devions à ces tendances, encore, la Scène aux champs, la Marche des pèlerins, etc., scènes de moindre envergure, il est vrai,