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SOUVENIRS

Question sur laquelle il m’est difficile de me prononcer à coup sûr : environ lui quart d’heure avant le moment en question, j’aperçus seulement ma propriétaire et son mari, et, chose très surprenante, un Juif polonais, en grand costume, aux fauteuils d’orchestre. Néanmoins j’espérais encore une plus grande affluence, quand soudain les scènes les plus inouïes se passèrent dans les coulisses. Là, le mari de ma première chanteuse (qui jouait Isabella) battait le deuxième ténor (qui chantait Claudio) ; ce dernier était un tout jeune et joli homme, depuis longtemps, l’époux mortifié nourrissait secrètement contre lui une rancune jalouse. Il semblait que ce mari, après s’être convaincu comme moi au rideau de l’état du public, jugeait enfin arrivée l’heure si longtemps attendue où, sans causer de dommage à l’entreprise théâtrale, il pourrait exercer sa vengeance sur l’amant de sa femme. Claudio, vigoureusement frappé et poussé par lui, dut, le malheureux, s’esquiver au vestiaire, le