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SOUVENIRS

n’en persiste pas moins dans son projet de délivrer le monde du plus affreux hypocrite qui ait jamais voulu lui dicter des lois. Elle a fait savoir à Marianne qu’au rendez-vous convenu avec Friedrich pour la nuit prochaine, Marianne doit se substituer à son amie Isabella, objet d’une perfide convoitise ; elle envoie donc à Friedrich l’invitation à ce rendez-vous, qui, pour mieux envelopper l’ennemi dans sa perdition, doit se passer sous le masque et le déguisement, en un lieu de plaisir interdit par le gouverneur lui-même. Ayant formé le dessein de punir aussi cet écervelé de Lucio pour l’audacieuse proposition d’amour faite à la novice, elle lui fait part de la convoitise de Friedrich et de la résolution, à laquelle elle se suppose forcée par la nécessité, de céder à ses désirs ; elle explique la chose avec une aisance si inimaginable, que le franc étourdi d’auparavant en éprouve la stupéfaction la plus sérieuse, la rage la plus désespérée ; il jure que s’il convient à la noble vierge de subir cet outrage inouï, il tentera