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DÉFENSE D’AIMER

à ses paroles, dès qu’il s’agirait de repousser le reproche d’avoir fait une proposition libertine. Isabella, confuse elle-même et troublée, reconnaît ce qu’il y avait d’excessif dans sa tentative, et s’abondonne à la rage muette du désespoir. Mais lorsque Friedrich, de nouveau, annonce au peuple la suprême rigueur, et à l’accusé sa sentence, Isabella, guidée par le douloureux sort de Marianne, s’arrête, avec la rapidité de l’éclair, à l’expédient sauveur d’obtenir par la ruse ce qu’il semble impossible d’atteindre par la franche violence. C’est pourquoi ses sentiments, par un retour brusque, passent de la plus profonde affliction au plus libre enjouement : elle s’adresse au frère désolé, à son ami consterné, à la foule perplexe, en annonçant qu’elle leur prépare à tous la plus plaisante aventure ; car les réjouissances du carnaval, que le gouverneur vient de défendre sévèrement, doivent être fêtées cette fois avec une extravagance toute particulière : en effet, cet homme aux interdictions redoutées ne se