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SOUVENIRS

par Tristan, avaient occupé son âme lumineuse, à la fin exhalée.

Avec Bülow, nous espérions arriver à Dresde à temps pour l’enterrement de cet ami que nous avions aimé en commun : ce fut en vain ; il avait fallu qu’on rendît déjà le cadavre à la terre, quelques heures avant le temps fixé ; nous arrivâmes trop tard. À la même heure, par un clair soleil de juin, la ville de Dresde, pavoisée aux mille couleurs, était en liesse, et se portait à la réception des bandes de voyageurs qui faisaient leur entrée, se rendant à la fête universelle des sociétés chorales allemandes. Le cocher qui nous conduisait, vivement pressé par moi d’atteindre le cimetière, me disait, en cherchant à grand’peine à se frayer un passage à travers la presse, que près de 20,000 chanteurs étaient arrivés au rendez-vous. « Oui ! » pensai-je, « et justement le chanteur n’est plus là ! »

Nous nous hâtâmes de tourner le dos à Dresde !