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MES SOUVENIRS SUR SCHNORR

querais moi-même directement à la répétition, me tenant debout près de lui sur le théâtre pendant cette scène. Là, je me placerais tout contre lui ; là, suivant pas à pas la musique et l’ensemble des développements de la scène, depuis la chanson du pâtre jusqu’au défilé des pèlerins, je lui soufflerais la marche intérieure des sentiments extatiques, depuis la complète et sublime inconscience, jusqu’au réveil graduel de la perception extérieure, produit surtout par la renaissance de l’ouïe, tandis qu’il interdit encore à son regard, désensorcelé par la vue de l’azur céleste, de reconnaître l’ancien monde terrestre de la patrie, comme s’il craignait de rompre le charme ; ce regard restant fixe et ne cessant pas d’être dirigé vers le ciel, seuls, le jeu expressif de la physionomie et, finalement, une molle détente dans l’attitude guindée du corps, doivent trahir l’invasion de l’attendrissement dans l’âme régénérée, jusqu’à ce que toute agitation s’évanouisse devant l’assujettissement divin, jusqu’à ce que le pécheur s’af-