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SOUVENIRS

seuls, les altos lui en voulurent longtemps (l’une peur bleue qu’il leur lit. Au finale du deuxième acte, il arriva que l’exécution du dessin de leur partie, qui accompagne de son frémissement doux la lugubre cantilène de Julia, ne répondit pas à l’intention du maitre : aussi, s’étant soudain tourné de leur côté, leur cria-t-il d’une voix caverneuse, sépulcrale : « Les altos sont-ils morts !..... »[1]. À cette apostrophe, les deux blêmes vieillards, hypocondriaques incurables, qui, à mon grand déplaisir, s’étaient obstinés jusqu’alors à se cramponner ferme au premier pupitre, bien qu’ils eussent l’expectative de leur retraite, levèrent des yeux hagards vers Spontini, avec le véritable effroi de gens qui viennent d’entendre une menace..... J’eus toutes les peines du monde à les rappeler progressivement à la vie : je tâchai de leur expliquer ce que voulait Spontini, en m’abstenant toutefois

  1. Ist der Tod in den Bratschen !... Littéralement : La Mort est-elle parmi les altos !