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SOUVENIRS

fut une occasion de faire à mon propre sujet une expérience particulière ; car, pour la première fois de ma vie, j’étais chargé de prononcer en public un discours solennel. Depuis, quand le cas s’est présenté de faire des discours, je n’ai jamais parlé que ex tempore ; pour ce début, et afin de donner à ma harangue la concision nécessaire, je l’avais cependant développée par écrit et apprise par cœur. Tout plein de mon sujet et des réflexions qu’il m’avait inspirées, je me croyais si sûr de ma mémoire, que je n’avais songé à prendre aucune mesure pour qu’on me vînt en aide ; aussi causai-je à mon frère Albert, qui se tenait non loin de moi pendant la cérémonie, un instant de vive perplexité, au point qu’il m’avoua m’avoir maudit, dans l’excès de son saisissement, pour ne pas lui avoir remis le manuscrit afin qu’il me soufflât. En effet, il m’était arrivé ceci : ayant commencé mon discours à voix claire et pleine, je fus, pendant un instant, si vivement affecté par l’impression