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tions de mes amis n’était pas de nature à m’inspirer sur l’esprit de ces exécutions en général une conclusion très-favorable, et je dois dire la même chose du caractère de la plupart de nos représentations d’opéra. Confirmé par là dans mes dispositions pessimistes, je jouissais d’ailleurs de l’avantage des pessimistes : ce que je voyais percer çà et là de bon et de distingué me causait d’autant plus de joie que je me croyais moins fondé à l’attendre et moins autorisé à l’exiger. Autrefois, quand j’étais optimiste, j’avais fait partout du bon et de l’excellent — qui me semblait possible — une obligation rigoureuse, et cela m’avait jeté dans l’intolérance et dans l’ingratitude. Les résultats supérieurs, dont j’étais informé de temps en temps sans m’y attendre, me remplissaient d’une ardeur nouvelle en même temps que d’une vive reconnaissance ; il m’avait paru jusqu’alors qu’il n’était possible d’arriver à des résultats excellents que dans des conditions générales toutes nouvelles, et il me fut montré que cette possibilité se rencontre dès aujourd’hui, au moins comme exception.

Une chose me frappa avec plus de force encore peut-être : ce fut de voir l’impression extraordinaire que mes opéras, malgré une exécution parfois très-médiocre et qui souvent les défigurait, avaient produite sur le public. Je me rappelle par moments l’antipathie, l’hostilité des critiques, qui n’avaient vu, dans mes écrits précédemment publiés sur l’art, qu’une abomination, qui s’entêtaient à vouloir que des opéras écrits à une époque bien plus ancienne eussent été composés comme une confirmation tardive et réfléchie de mes théories, et s’étaient, surtout