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MES TROIS CONCERTS À ZURICH (MAI 1853)

pris que la ballade de Senta du Fliegender Hollaender ; la femme du directeur de musique Heim la chanta d’une belle voix non exercée, mais avec un zèle irrépro chable.

Toute l’entreprise ayant, en somme, un caractère plus patriarcal que public, j’avais cru réaliser le vœu d’un grand nombre de mes connaissances en les initiant, selon mes moyens, au caractère de ma musique. Or, pour cela, il était indispensable de connaître le canevas poétique de mes œuvres. J’avais donc invité ceux qui pensaient fréquenter le concert à venir, trois soirs durant, écouter, dans la salle de la Société de musique, la lecture du texte des trois opéras dont étaient tirés les morceaux figurant au programme. On répondit avec ardeur à mon invitation et je pus me dire que mon public zurichois était mieux préparé que nul autre à l’audition des fragments caractéristiques de mes œuvres.

Ces concerts furent particulièrement émouvants pour moi parce que c’était la première fois que j’entendais quelque chose de mon Lohengrin exécuté par un orchestre. Je pus me rendre compte ainsi de l’effet produit par mes combinaisons d’instruments dans le prélude. Entre deux concerts, il y eut un banquet et sauf celui de Pesth plus tard, celui de Zurich est le seul qu’on ait jamais organisé en mon honneur. Le toast de M. Ott-Usteri, le respectable président de la Société de musique, me toucha sincèrement. Il s’adressa aux musiciens venus de côtés si différents et les rendit attentifs au but et aux résultats de cette réunion, leur recommandant d’emporter avec eux la conviction qu’ils avaient participé à un grand