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VISITE D’UHLIG À ZURICH

de danger et c’est poursuivi sans cesse par l’image de Carl fracassé au fond d’un précipice, que je finis par arriver heureusement avec les autres à la cabane.

Uhlig et moi, nous étions décidés à descendre de l’autre côté de la montagne par un sentier qui n’était pas sans risques ; je persuadai donc à Ritter de rester dans la hutte et d’attendre le retour du guide qui, après nous avoir indiqué notre chemin, reviendrait pour l’accompagner sur la route facile que nous avions prise en montant. Nous nous séparâmes donc. Lui, alla du côté de Saint-Gall, tandis que nous nous dirigions par le beau Toggenbourg vers Rapperswyl et le lac de Zurich. Nous ne fûmes rassurés sur le sort de Carl que bien des jours après, lorsqu’il arriva enfin à Zurich. Il ne demeura que peu de temps auprès de nous et ne tarda pas à nous quitter, sans doute pour ne pas être tenté de nous accompagner dans une nouvelle course de montagne que nous avions projetée. Je n’eus de ses nouvelles que bien plus tard, alors qu’il séjournait depuis assez longtemps à Stuttgart où il semblait vivre heureux dans l’intimité d’un jeune acteur dont il avait rapidement fait son ami.

De mon côté, j’étais heureux aussi de jouir de la société du jeune musicien dresdois, si extraordinairement bien doué et d’un caractère si ferme et si doux à la fois. Avec ses cheveux blonds bouclés et ses beaux yeux bleus, Uhlig produisait à ma femme l’effet d’un ange descendu parmi nous. Son visage avait pour moi quelque chose de particulièrement intéressant par le fait qu’il ressemblait d’une manière frappante au roi de Saxe alors régnant, Frédéric-Auguste, mon ancien protecteur. Cette res-