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EXPLICATIONS DE HANSLICK

J’étais en plein dans ces soucis quand, à ma grande surprise, la direction de l’Opéra de Vienne m’invita à assister à la première de Tristan. On m’annonçait que les difficultés étaient levées, car Ander était complètement guéri de sa maladie de gorge. J’éprouvai un sincère étonnement à cette nouvelle et, m’étant informé, j’appris ce qui s’était passé à Vienne pendant tout ce temps. Avant mon dernier départ de cette ville, Mme Louise Dustmann, désirant jouer le rôle d’Iseult qui lui plaisait, s’était efforcée de supprimer le véritable obstacle à la réussite de mon entreprise.

Dans ce but, elle avait donné une soirée à laquelle nous avions été invités tous les deux, le docteur Hanslick et moi. La cantatrice savait que sans le bon vouloir du critique on n’arriverait à rien. Comme j’étais fort bien disposé ce jour-là, il me fut aisé de m’occuper de Hanslick ainsi que d’un convive quelconque jusqu’au moment où il m’attira à l’écart dans un entretien particulier. Pleurant et sanglotant, Hanslick m’assura qu’il ne pouvait supporter davantage d’être méconnu par moi ; ce qu’il avait dit de ma musique ne provenait pas de sa méchanceté, mais bien plutôt de son ignorance et il me suppliait de l’éclairer et de l’instruire. En me donnant cette explication, il était si fortement ému que je ne pus vraiment que le consoler et lui promettre que je m’intéresserais sérieusement à son activité future. Et, en vérité, peu de temps avant mon départ, j’avais appris que Hanslick s’était exprimé dans les termes les plus chaleureux sur moi et mon amabilité. Or, ce revirement avait eu une telle influence sur les chanteurs de l’Opéra et surtout sur