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LE PEINTRE CÉSAR WILLIG

lui semblait qu’il ferait très bien à la tête d’un pénitencier : maintenant il connaissait à fond ce genre d’établissement et il savait les améliorations qui pourraient y être introduites. Rœckel se rendit à la fête de tir de Francfort qui avait lieu à cette époque, et ne put éviter l’ovation publique et flatteuse que lui valurent son martyre et sa ferme conduite. Il resta quelque temps dans cette ville et ses environs.

Dans ce temps-là, je fus bien ennuyé, et mes amis avec moi, par un peintre, nommé César Willig, qu’Otto Wesendonck avait chargé de faire mon portrait. Cet artiste n’arriva pas à se familiariser avec ma physionomie, bien que Cosima, qui assistait aux séances, se donnât toutes les peines du monde pour le mettre sur la bonne voie. Finalement, il me prit de profil et fit une peinture des plus rudimentaires, mais où se trouvait du moins une certaine ressemblance. Ayant ainsi obtenu un résultat qu’il déclara satisfaisant, Willig exécuta du portrait une copie qu’il m’offrit. Moi, je l’expédiai sur-le-champ à Minna à Dresde. Plus tard, elle est revenue à ma sœur Louise. C’était une horrible peinture que je revis à Francfort, où le peintre l’avait exposée.

Un soir, je fis avec les Bülow et les Schnorr une ravissante promenade jusqu’à Bingen. De là, j’allai prendre Frédérique Meyer qui, convalescente, séjournait à Ruedesheim, de l’autre côté du Rhin, et la présentai à mes amis. Ils s’intéressèrent infiniment à cette femme remarquable ; Cosima, surtout, l’apprécia beaucoup. Notre gaieté qu’animaient le vin et le plein air s’accrut par un fait inattendu. Un voyageur assis à une table assez