Page:Wagner - Ma vie, vol. 3, 1850-1864.pdf/387

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

375
JE PROPOSE LE DIVORCE À MINNA

ayant désigné Dresde comme lieu de résidence, mais voulant encore lui épargner l’humiliation du divorce, j’avais fini par accomplir les démarches que, par son entremise, me demandait le ministre de la justice de Saxe. J’avais donc réclamé mon amnistie et l’on me l’avait accordée, m’autorisant ainsi à me fixer à Dresde. Alors Minna se crut en droit de louer un grand appartement et de l’installer au mieux avec le mobilier que je lui avais laissé ; elle se figurait que je me déciderais bien à venir le partager avec elle, par intermittence du moins. Sans réplique, je dus lui fournir les neuf cents thalers qu’elle exigea pour cela. Mais plus je me montrais résigné sous ce rapport, moins elle comprenait la froideur de mes lettres, dont le ton calme la blessait. Elle m’adressait des reproches sur toutes sortes de soi-disant torts anciens, et elle se servait de termes de plus en plus grossiers.

Finalement, j’eus recours à mon vieil ami le docteur Pusinelli qui, par affection pour moi, avait fidèlement soutenu la malheureuse femme au caractère si difficile ; je lui demandai d’avoir recours envers Minna au remède violent que récemment ma sœur Clara m’avait recommandé comme le meilleur : je priai mon ami de lui faire comprendre la nécessité d’une séparation définitive entre nous. Cette mission ne fut pas des plus aisées à remplir pour le pauvre Pusinelli. Il me raconta que Minna fut d’abord fort effrayée, puis qu’elle refusa catégoriquement de consentir jamais de son plein gré au divorce. Toutefois la prédiction de ma sœur s’accomplit : la manière d’être de Minna changea de façon frappante à partir de ce moment. Elle cessa de me tourmenter et parut prendre