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ARRIVÉE À PARIS (DÉCEMBRE 1861)

Je me demandai alors s’il ne serait pas plus raisonnable de choisir à Carlsruhe ou dans les environs un gîte modeste et provisoire qui, plus tard, pourrait peut-être devenir définitif. Il me paraissait aussi plus convenable et plus économique de reprendre Minna chez moi, car, selon la promesse que je lui avais faite, je lui allouais mille thalers par an. Mais une lettre qu’elle m’écrivit à cette époque me fit perdre toute envie de rapprochement : elle s’y efforçait de me monter la tête contre certaines personnes de mes amis, je persistai donc à réaliser mon plan de Paris, qui avait l’avantage de m’éloigner d’elle le plus possible.

Je me mis en route vers la mi-décembre 1861, et, pour commencer, je me logeai dans le modeste « Hôtel Voltaire », sur le quai du même nom. Ma chambre était des plus simples, mais la vue me plaisait. Je pensais rester là pour me recueillir et y demeurer inaperçu jusqu’au moment où, avec la nouvelle année, je pourrais me présenter chez la princesse de Metternich, ainsi qu’elle l’avait désiré. Afin de ne pas mettre dans l’embarras Hatzfeld et Pourtalès, amis des Metternich, je ne me montrai pas chez eux non plus. Je ne vis que celles de mes anciennes connaissances qui se trouvaient en dehors de mon nouveau projet, c’est-à-dire Truinet, Gaspérini, Flaxland et le peintre Czermak. Je dînais régulièrement avec Truinet et son père à la « Taverne anglaise » où, sans risquer d’être reconnu, je pouvais me rendre le soir en me glissant par les rues obscures. Mais un jour, en ouvrant le journal, j’y lus la nouvelle du décès subit du comte de Pourtalès. Quels ne furent pas mon chagrin et mon regret surtout,