Page:Wagner - Ma vie, vol. 3, 1850-1864.pdf/326

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

314
CARL TAUSIG. - STANDHARTNER. — CORNÉLIUS

Je descendais les escaliers du palais impérial, assez préoccupé de la nouvelle tournure que prenaient mes affaires, lorsque, près du portail, je rencontrai un homme de belle taille et de mine extrêmement sympathique. Il s’approcha de moi et m’offrit sa voiture pour m’accompagner à mon hôtel. C’était Joseph Standhartner, méde cin réputé dans la haute société viennoise et grand mélomane ; il devint et resta toujours mon ami dévoué.

J’avais retrouvé Cari Tausig à Vienne ; il était venu conquérir la capitale autrichienne aux œuvres de Liszt. L’hiver précédent déjà, il avait travaillé dans ce sens en donnant une série de concerts qu’il avait organisés et dirigés lui-même. Il m’amena aussi Peter Cornélius, que je connaissais par notre rencontre de Bâle en 1853, et qui était venu échouer à Vienne. Tous les deux s’exaltaient à parcourir l’arrangement de Tristan pour piano, que Bülow venait d’achever. Par les soins de Tausig, un piano à queue de Bœsendorff fut transporté dans ma chambre d’hôtel et nous nous livrâmes à la musique avec un véritable emportement. On eût aimé commencer sur-le-champ les répétitions de Tristan et on me pria si instamment de réserver à Vienne la première de cet opéra, que je finis par promettre de revenir dans quelques mois afin de l’y mettre en répétition.

Me sentant assez mal à l’aise de devoir communiquer au grand-duc de Bade ce changement de mes projets, je fis un singulier détour pour atteindre Carlsruhe. Mon anniversaire de naissance tombant ces jours-là, je résolus de le fêter à Zurich. Par Munich, je parvins sans arrêt à Winterthour, où je pensais voir mon ami Sulzer. Malheu-