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LA PRINCESSE CAROLINE À ZURICH

Lorsque Liszt le sut, il regretta à son tour cette brouille et, avec sa générosité habituelle, il fit les premiers pas d’un rapprochement. Il alla chez Ritter ; mais dans la conversation, il ne fut pas question de l’incident. C’est pourquoi le jeune homme rendit cette visite non à Liszt, mais à la princesse qui était arrivée sur ces entrefaites. Là-dessus, Liszt trouva que cela suffisait et dès lors Ritter ne fit plus partie de notre cercle. Il quitta Zurich et s’établit à demeure à Lausanne.

Quand la princesse Caroline et sa fille se furent installées à l’hôtel Baur avec l’intention d’y rester quelque temps, on mena grand train, non seulement dans mon modeste logis, mais encore dans toute la ville de Zurich. La singulière animation que répandait cette femme partout où elle paraissait, atteignit même ma bonne sœur Clara, qui se trouvait encore parmi nous, et lui communiqua une véritable griserie. On eût dit que Zurich était soudain devenu une métropole. Des voitures allaient et venaient, des domestiques couraient de-ci, de-là, dîners et soirées se succédaient et nous nous trouvâmes subitement entourés d’une quantité de personnages intéressants qui, de tous côtés, surgirent sans que nous nous fussions jamais doutés qu’ils habitassent Zurich.

Un musicien, Winterberger, qui se croyait obligé de jouer à l’original, avait été amené par Liszt ; Kirchner, l’adepte passionné de Schumann, arriva de Winterthour pour ne plus s’en retourner et ne se fit pas faute, lui non plus, de montrer son excentricité. Mais c’était surtout les professeurs de l’Université que la princesse Caroline s’entendait à tirer de leurs habitudes casanières. Tantôt