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ARRIVÉE DE SEMPER À ZURICH

et romain ; au troisième enfin, dans le monde du moyen âge et des temps modernes. Ma proposition le tenta véritablement et il crut qu’il pourrait en faire quelque chose. Mais ce ne fut pas l’avis du quelque peu cynique docteur Wille, dans la maison de campagne duquel nous nous réunissions souvent. Il prétendit que nous demandions trop de Herwegh. Celui-ci n’était au fond qu’un brave garçon souabe qui, à cause du nimbe juif dont sa femme lui parait le front, avait été jugé et estimé au-dessus de sa valeur. À ces considérations désobligeantes, je ne sus répondre qu’en haussant les épaules : avec le temps, le pauvre Herwegh devint en effet de moins en moins actif et il finit même par tomber, à ce qu’il me sembla, dans une complète incapacité.

Notre cercle obtint une animation nouvelle par l’arrivée de Semper à Zurich. Les autorités suisses s’étaient adressées à moi pour que j’obtinsse son consentement à se laisser nommer professeur à l’École polytechnique fédérale. Semper vint à Zurich se rendre compte de la chose et il emporta une excellente impression de sa visite. Dans une promenade que nous fîmes ensemble, il se réjouit de voir de vrais arbres sur lesquels rampaient de vraies chenilles. Il se décida donc à se fixer à Zurich, et c’est ainsi que lui et sa famille se joignirent pour longtemps au cercle de mes connaissances. Cependant, Semper ne pouvait guère espérer recevoir de commandes de grands édifices à bâtir ; il était condamné, comme il disait, au métier de maître d’école. Mais il fut bientôt captivé par un important ouvrage d’art qu’après bien des déboires et après avoir changé souvent d’éditeur, il publia