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FÊTE DE MUSIQUE À SION (JUILLET 1854)

se tenaient encore à l’écart. Cette année spécialement, il me fut pénible de devoir constater que je n’arrivais à percer ni à Berlin, ni à Vienne. J’en eus des soucis qui me tourmentèrent pendant une grande partie de l’année. Pour chasser ces préoccupations, je me replongeai dans mon travail et au lieu de me borner à mettre au net l’Or du Rhin, j’attaquai tout de suite la composition de la Walkyrie. La première scène était achevée vers la fin de juillet, lorsqu’un voyage dans la Suisse méridionale vint m’interrompre à nouveau.

La Société fédérale de musique m’avait invité à diriger à Sion le festival de sa réunion annuelle. J’avais refusé tout en promettant, si les moyens étaient suffisants, de diriger à l’un des jours de fête la Symphonie en la majeur de Beethoven. Par la même occasion, je pensais aller à Montreux, faire visite à Carl Ritter qui y séjournait avec la jeune femme qu’il venait d’épouser. Je m’y arrêtai à peu près huit jours, apprenant avec quelque inquiétude à connaître les singularités de ce nouveau ménage, où je ne pouvais découvrir les signes d’un bonheur durable. Puis, je partis avec Carl Ritter pour le Valais, où avait lieu la fête de musique. En chemin, à Martigny, un jeune homme fort original se joignit à nous. Je l’avais vu l’année précédente à Zurich à l’occasion de mes grands concerts et il m’avait été présenté comme musicien enthousiaste. C’était Robert de Hornstein. Mon jeune ami Ritter paraissait fort content d’avoir trouvé ce compagnon très amusant. Hornstein désirait tant suivre notre fortune qu’ayant entendu dire que je dirigerais la fête fédérale de musique, il était venu exprès de Souabe en Suisse.