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ESQUISSE DE L’« OR DU RHIN » (NOV. 1853 À JANV. 1854)

danum dans les crises aiguës. Au demeurant, la valériane lui paraissait le remède le plus efficace.

Très fatigué, très agité, et finalement excité à un point douloureux, je quittai Paris avec Minna à la fin d’octobre 1853, sans avoir compris pourquoi j’étais venu y dépenser tant d’argent. Espérant que la diffusion de mes œuvres en Allemagne m’apporterait quelque dédommagement, je rentrai résigné à Zurich, avec la ferme intention de ne plus en sortir que je n’eusse mis en musique tout au moins quelques parties de mes Niebelungen. Dès le commencement de novembre, j’entrepris en effet ce travail si longtemps retardé. Depuis la fin de mars 1848, il y avait cinq ans et demi que je me tenais éloigné de toute composition musicale. Si j’ai réussi très vite à me retrouver dans la bonne disposition d’esprit, cela provient certainement de ce que cette reprise de mes travaux de compo siteur correspondait à la renaissance qui suivit une sorte de migration de mon âme. En ce qui concernait le côté technique de mon œuvre, je me vis embarrassé lorsque je voulus, suivant mon habitude, esquisser sur deux portées le motif introductif que j’avais conçu dans mon assoupissement à la Spezzia. Dès le début, je fus forcé d’avoir recours au formulaire pour partition complète et cela m’induisit à adopter une nouvelle manière d’écrire : à grands traits rapides au crayon, j’ébauchai la partition complète de ma composition. De sérieuses difficultés découlèrent plus tard de ce procédé, car la moindre interruption de mon travail me faisait oublier la signification des signes hâtifs que j’avais jetés sur mon formulaire et je ne retrouvais ensuite qu’avec peine ce que j’avais