Page:Wagner - Ma vie, vol. 1, 1813-1842.pdf/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

228
SITUATION DIFFICILE AU THÉÂTRE

de cette basse origine rompt immédiatement le mariage, et la belle jeune femme, vaincue par la ruse masculine, dédommage le fiancé éconduit en lui accordant sa propre main.

Je donnai à ce sujet sans prétention le titre de : l’Heureuse famille d’ours, et je l’enjolivai d’un dialogue qui eut plus tard toute l’approbation de Holtei. Je m’apprêtai donc à composer sur ce livret une musique légère dans le style de la musique française moderne. Mais les soucis de plus en plus sérieux que me causait ma situation entravèrent le développement de ce travail.

Mes rapports désagréables avec la direction musicale du théâtre étaient une source intarissable d’ennuis.

Sans avoir l’occasion et les moyens de me défendre, il me fallait supporter les calomnies de toute sorte que lançait contre moi mon rival, maître du terrain. Son but était évidemment de me dégoûter de la place qu’on m’avait promise pour Pâques. Bien que je ne perdisse pas confiance, je souffrais de ce qu’il y avait d’humiliant et d’accablant dans cette situation persistante. Et lorsque, enfin, au commencement d’avril, le moment arriva où le chef de musique Schubert dut me céder définitivement son poste, il eut la triste satisfaction de me laisser une troupe d’opéra fort amoindrie, spécialement par le départ de la première cantatrice, de sorte que la continuation de l’entreprise théâtrale se trouvait compromise.

Comme sur tous les théâtres d’Allemagne, les mois du printemps exerçaient sur celui de Königsberg aussi leur désastreuse influence de dépeuplement. Le directeur se donnait toutes les peines du monde pour combler