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EXCURSION AVEC MINNA

À mi-chemin, je rencontrai Minna qui retournait à Magdebourg avec une de ses sœurs. Aussitôt, je pris un billet pour Leipzig, afin de jouir de la société de mon amie. Mais avant même d’arriver à la première halte, j’avais réussi à persuader à Minna de retourner avec moi à Dresde, et je décidai de prendre une berline particulière, puisque la poste était passée depuis longtemps. Cette façon brillante de faire les choses remplit les deux jeunes filles d’admiration et de bonne humeur. Ma prodigalité leur promettait les plus agréables aventures ; il s’agissait de les réaliser. À Dresde, j’empruntai à une de mes connaissances une assez forte somme qui me permit d’emmener mes amies dans la Suisse saxonne. Nous y passâmes des jours heureux, pleins d’innocente et de juvénile gaieté, et qui ne furent troublés qu’une fois par un de mes accès de jalousie. Cette jalousie n’avait aucune raison d’être durant ce voyage, mais je la portais en moi ; elle résultait des impressions du passé et d’une crainte indéfinie de l’avenir, crainte motivée par les expériences que j’avais faites jusqu’alors avec les femmes.

Malgré cela, cette excursion, et particulièrement une admirable et chaude nuit d’été que nous passâmes presque entière en plein air, aux bains de Schandau, demeura pour ainsi dire le seul souvenir heureux de mon amour de jeunesse. Mes relations postérieures avec Minna, si pleines de soucis et d’amertume, m’ont souvent semblé l’expiation durable du bref et candide bonheur de ces journées.

J’accompagnai Minna jusqu’à Leipzig d’où elle con-