Page:Wagner - Ma vie, vol. 1, 1813-1842.pdf/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

113
TEXTE D’OPÉRA : « LES NOCES »

défendre son honneur, elle a la force de le précipiter du balcon dans la cour du château où il s’écrase. Sa mort demeure une énigme jusqu’à l’heure des funérailles. La noble dame y assiste aussi. Soudain, au moment de la prière, elle s’affaisse pour ne plus se relever. Ce récit imposa à mon imagination l’empreinte ineffaçable de la puissance mystérieuse d’un sentiment passionné et renfermé en lui-même. Sous l’influence de la manière d’Hoffmann, qui a traité de semblables sujets dans ses Contes, je traçai les grandes lignes d’une nouvelle dans laquelle je fis entrer le mysticisme musical qui m’était si cher alors. L’action devait se passer dans le domaine d’un nouveau Mécène. On va célébrer le mariage d’un couple d’amants. L’ami du fiancé, jeune homme mélancolique, taciturne et intéressant, est invité à la noce. Un vieil organiste étrange se trouve intimement mêlé à cette société. Les liens invisibles qui unissent le vieux musicien, le jeune homme mélancolique et la fiancée devaient se révéler par le dénouement du drame, tragique comme celui de Busching.

Le jeune homme ayant été tué d’inexplicable façon, on expose son cadavre dans le cercueil. La fiancée de son ami expire alors à ses côtés tout aussi mystérieusement. Et le vieux musicien qui touche de l’orgue à cette saisissante cérémonie meurt à son tour sur son clavier en plaquant un dernier accord de trois notes, qui se prolonge à l’infini. Je n’étais pas arrivé à écrire cette nouvelle, mais comme il me fallait le texte d’un opéra, je repris ce sujet sous sa forme primitive. J’en gardai les traits principaux et je construisis l’action dramatique suivante :