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Si pour le Juif cultivé, comme pour tout autre, le retour à l’âme populaire est quelque chose d’involontaire et d’inconscient, il est évident que l’impression qu’il en retire est tout aussi inconsciente et que celle-ci se reportera impérieusement sur ses productions artistiques et que ses créations s’en ressentiront puissamment.

De même que nos chansons et nos danses populaires ont une action sur les créateurs de notre art musical et instrumental, de même les mélismes et les rythmes des chants de la synagogue s’emparent de l’imagination musicale du Juif cultivé. Il ne peut donc comprendre dans notre production musicale, tant populaire qu’artistique, que ce qui a un trait commun ou quelque analogie avec la musique juive, et cela seul, il pourrait l’utiliser pour ses créations d’art. Certes, si le Juif avait conscience qu’il n’existe rien dans notre art, populaire ou savant, qui soit de la même essence que celui de sa race, s’il en sondait l’âme et s’il prenait conscience qu’il est pour nous un étranger, il reculerait épouvanté et ne tenterait pas une collaboration déconcertante. Mais le Juif ne peut nous connaître, volontairement ou non, il ne s’arrête qu’aux faits extérieurs et superficiels. Et trouvant dans l’apparence fortuite de certaines œuvres, une analogie plus ou moins existante, il consacre celle-ci comme si elle était l’essence même de nos créations. Aussi, lorsqu’il lui arrive de vouloir nous faire part de ses impressions artistiques, celles-ci nous paraissent froides, lointaines, indifférentes, contre-nature et déformées. Nous avons la même impres-