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AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

superflu ; et à « développer davantage », en revanche, « les traits » les plus « propres à mettre » dans son jour, « dans son vrai jour, » le surnaturel « coloris ca- ractéristique du sujet » : ce coloris lui semblait en effet correspondre, aux motifs intimes de l’action, jusqu’à s’identifier à elle (1).

Si cet idéal avoué (le développement de l’action par ses motifs intimes) se trouve déjà réalisé, moins incomplètement, dans Tannhäuser (2), toutefois Tannhäuser encore, presque autant que le Vaisseau-Fantôme, peut se rattacher, quant à la forme, aux opéras traditionnels des prédécesseurs de Richard Wagner (3), par d’incontestables analogies. Du moins s’en distingue-t-il, il y faut insister, par l’absence de ces concessions que Weber lui-même, ce pur, noble et profond esprit, reculant « devant les conséquences de sa méthode si pleine de style, » s’était résigné, quelquefois, à faire au « public d’opéra, » aux « exigences banales d’un livret d’opéra. » (4) Suivant le témoignage qu’à bon droit s’est en personne rendu l’auteur (5), Tannhäuser contient, quelque fondé qu’il soit sur le merveilleux légendaire, une action dramatique, développée avec suite, dont le principe est le salut d’une âme sollicitée par deux surnaturels instincts contradictoires. C’est à cette action dramatique, toute surhumaine et toute humaine, toute psychologique et toute passionnelle, qu’indubitablement Wagner avait pour but d’intéresser les spectateurs,

(1) Cf. Lettre sur la Musique, éd. nouv., pp. LIX-LX.

(2) « La catastrophe finale naît ici, sans le moindre effort, d’une lutte lyrique et poétique où nulle autre puissance que celle des dispositions morales les plus secrètes n’amène le dénouement, de sorte que la forme même de ce dénouement relève d’un élément purement lyrique. (Id., p. LX).

(3) Cf. Id. LXXVII.

(4) Cf. Id., p. LXXXI.

(5) Cf. Id., p. LXXXIII.