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AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

cette « forme artistique idéale », qui « peut être entièrement comprise sans réflexion (1)», à ces émotions si complexes, à cette révélation, quasi surnaturelle, des seules Réalités du monde.

Maintenant donc, puisque nous parlions auparavant, non de la Symphonie avec Chœurs, mais de Juive, et du Freyschütz, et de l’opéra, et des impressions produites par la Juive, par le Freyschütz, sur Richard Wagner, et des problèmes déconcertants proposés, à Richard Wagner, relativement à l’opéra, par la différence même de pareilles impressions : quel rapport avec l’opéra peuvent avoir et cette Symphonie, et toutes ces prétendues « paroles » conditionnelles de Beethoven, tous ces prétendu « Si » posthumes ? - Avec l’opéra ? Quel rapport ? Aucun : mais aussi est-ce bien là pourquoi cette Symphonie, ces prétendues « paroles », ces « Si », permettaient à Richard Wagner de pressentir, aussitôt après Rienzi, la solution définitive : la nécessité d’une rupture, totale, avec le genre de l’opéra. Et la preuve, c’est qu’après ces prétendues « paroles », imaginairement entendues, réellement entendues pourtant, Wagner attribuait en outre à Beethoven, comme une conséquence naturelle, cette déclaration que, pour lui Beethoven, il ne voyait dans l’opéra, avec ses ariettes, avec ses duos, avec tout le bagage convenu qui l’encombre, que mensonge et vide musical sous les plus brillantes apparences, bref un genre, bien moins artistique qu’artificiel, à radicalement réformer, malgré la révolte certaine et des chanteurs, et du public. Ne suffirait-il point de lire ces phrases pour apercevoir, quand bien même Wagner n’aurait pas pris soin de le rappeler ailleurs, que l’éclat de l’idéal parisien avait déjà dès lors bien pâli à ses yeux, et qu’il commençait à puiser les lois, destinées à déterminer la forme

(1) Lettre sur la Musique, nouv. éd., pp. LXXIII-LXXIV.