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justifier la réalisation uniquement par le fait qu'elle exerça son activité première à la dissolution de la tragédie grecque, à la destruction de l'état athénien.

Où donc devons-nous puiser cette force dans notre état de débilité profonde ? Où prendre la forme humaine pour résister à la pression paralysante d'une civilisation qui renie complètement l'homme ? pour résister à l'outre-cuidance d'une culture qui n'emploie l'esprit humain que comme force motrice de sa machine ? Où trouver la lumière capable de dissiper l'horrible superstition régnante qui veut que cette civilisation, cette culture ait une valeur plus grande que le véritable homme vivant : qui veut que l'homme n'ait de valeur reconnue que comme instrument de ces abstraites puissances dominatrices, non de par lui-même en tant que homme ?

Là où le médecin expérimenté est à bout de ressources, nous retournons enfin en désespoir de cause à la nature. La nature et rien que la nature, peut en effet réussir à démêler seule la grande destinée du monde. Si la civilisation, partant de la croyance du christianisme que la nature humaine est méprisable, a renié l'homme, elle s'est créé par là un ennemi, qui doit nécessairement l'abolir un jour dans la mesure où l'homme ne trouve pas sa place en elle : car cet ennemi c'est précisément la nature éter-