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aussi révolutionnaires aujourd’hui qu’elles l’étaient alors : beaucoup d’entre-elles nous sont familières ; nous les rencontrons couramment dans les écrits de tendance anarchiste. Mais chez Wagner elles nous apparaissent plus concrètes, plus vivantes, moins théoriques : elles viennent d’un véritable homme, elles sont le résultat de l’expérience qu’il a faite de la vie, elles se sont développées avec lui, elles sont l’émanation de tout son être ; elles ne sont ni un postulat de la raison, ni une prétendue conséquence nécessaire de verités scientifiques. La lecture de « l’Art et la Révolution » a en ce sens quelque chose de décourageant : en comparaison des écrits de la plupart des prophètes de l’humanité à venir qui délayent en une prose parfois bien insipide une science de mauvais aloi, se font une philosophie des débris péniblement agencés de systèmes nés non-viables, et résolvent en un tour de main les questions les plus complexes avec une assurance déroutante, l’ouvrage de Wagner nous paraît si solide, si profond, si vraiment savant, si beau par le fond et la forme que nous sommes obligés de reconnaître l’absence de tout progrès dans le sens d’une précision croissante des idées libertaires. Et nous ne pouvons calmer notre esprit rendu inquiet par une semblable constatation qu’en nous persuadant que si ces idées pendant ces cin-