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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

manière poétique, et par les seuls moyens de l’art musical, un sens individuel à l’ouverture, ce qui tourne au profit de l’intelligence du drame.

Si l’on établit donc qu’il faut, sans sacrifier la destination spéciale de la musique, colorer par un mouvement dramatique le travail musical de l’ouverture en tant que la décision de la lutte musicale répond à la crise résultant des éléments constitutifs du drame, il faut revenir à poser cette question : le dénouement du drame ou les péripéties dans la destinée des personnages principaux doivent-ils exercer une influence immédiate sur la conception de l’ouverture, surtout à la péroraison ? Cette influence ne doit certainement être admise que d’une manière conditionnelle. L’ouverture, aussitôt qu’elle a posé ses pensées principales et ses moyens d’exécution dans le sens purement musical, peut toujours développer les principes constitutifs du drame, mais n’a rien à faire avec la destinée individuelle des personnages. Le compositeur ne doit résoudre que la question supérieure et philosophique de l’ouvrage, et exprimer immédiatement le sentiment qui s’y répand et le parcourt dans toute son étendue comme un fil conducteur. Ce sentiment arrive-t-il dans le drame à un dénouement victorieux, le compositeur n’a guère à s’occuper que de savoir si le héros de la pièce remporte cette victoire, ou s’il épronve une fin tragique.