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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

en plus dans la classe des morceaux qui méritent moins le nom d’ouverture que celui de pot-pourri.

L’histoire des pots-pourris commence à l’ouverture de la Vestale de Spontini. Quels que soient le génie et la poésie qu’on doive reconnaître dans ce morceau, il n’en contient pas moins les premières traces de cette manière légère et superficielle dans l’exécution de l’ouverture, manière qui a si généralement prévalu depuis ce temps. Pour peindre d’avance le mouvement dramatique d’un opéra, il ne fut plus question de créer un nouveau tableau existant par lui-même et en vertud’un enchaînement d’idées indépendantes, mais on y suppléa en dépeçant les images isolées de l’opéra, moins à raison de leur importance qu’à cause de leur éclat, et en les alignant l’une à côté de l’autre. Pour un public auquel on demandait ainsi moins de réflexion profonde, la séduction de cette manière de procéder consistait tout à la fois dans un choix habile des motifs les plus brillants et dans le mouvement agréable, dans le papillotage varié qui résultait de leur arrangement. C’est ainsi que naquirent l’ouverture si admirée de Guillaume Tell de Rossini, et celle de Zampa d’Hérold. On ne peut méconnaître dans les compositions de cette espèce une grande puissance d’amusement, mais la complète renonciation à une idée artistique et indépendante les rend indignes de compter dans l’histoire de l’art