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donc des Français, chez qui nous n’avions à découvrir que théâtre et virtuosité théâtrale, et retournons en Allemagne pour examiner plus attentivement de quelle façon s’y comportent ce théâtre et sa virtuosité.

IX

Schiller crie au génie allemand :

Cherche la beauté grecque et la force romaine.
Tu les soumettras à tes lois ;
Mais ne sors pas de ton domaine,
Ne tente pas le saut gaulois.

Et au fait, l’ours peut-il danser comme le singe pour gagner son pain ? — Ce serait là un spectacle repoussant, à la fois ridicule et triste.

Le mouvement allemand est la marche, l’andante qui, pour cette raison aussi, s’est développé avec tant de variété et d’expression dans la musique allemande, que des critiques y ont reconnu à bon droit son genre propre, et ont considéré comme une question esthétique vitale pour l’essence germanique de le conserver et de le cultiver soigneusement. Avec cette allure modérée, l’Allemand atteint tout à la longue ; il parvient à s’approprier énergiquement ce qui est le plus éloigné de lui. Des sculpteurs allemands étudièrent et enseignèrent en Italie ; lorsque les grands Espagnols eurent été expulsés par l’influence française de la scène de leur patrie, ils survécurent dans les poètes allemands ; et tandis que les Anglais faisaient des représentations de leur Shakespeare, des évolutions de cirque, l’Allemand se servait de leur prodige pour s’expliquer la nature. Avec cette