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terme à la Burschenschaft, cette ligue de démagogues.

La Prusse seule conserva une organisation militaire, issue de la période d’essor de l’Allemagne ; avec ce dernier reste de l’esprit allemand, extirpé partout ailleurs, la couronne de Prusse, un demi-siècle plus tard, gagna la bataille de Kœniggrætz, à l’étonnement du monde entier. L’effroi que cette armée inspira dans tous les conseils de guerre de l’Europe fut si grand, que le général le plus puissant de France dut concevoir le désir soucieux de former, de son armée à bon droit fameuse, quelque chose comme cette landwehr. Nous avons vu récemment combien tout le peuple français se raidissait contre cette idée. La civilisation française n’est donc pas parvenue à faire ce que l’Allemagne foulée aux pieds a créé d’une manière si prompte et si durable : une véritable armée populaire. Elle a recours, en compensation, à des inventions de nouveaux fusils se chargeant par la culasse et de canons d’infanterie. Comment la Prusse y répondra-t-elle ? Par un perfectionnement analogue des fusils, ou par la mise en œuvre de forces vives dont nul autre peuple d’Europe ne peut tirer parti en ce moment ? — Depuis cette mémorable bataille, livrée le surlendemain du jour où l’on avait célébré le cinquantième anniversaire de la fondation de la Burschenschaft, un grand changement s’est opéré, un problème d’une importance incommensurable s’est posé ; on dirait presque que l’empereur des Français en comprend la gravité mieux que les gouvernements des princes allemands. Un mot du vainqueur de Kœniggrætz, et une nouvelle force entre dans l’histoire, une force devant laquelle la civilisation française pâlira pour toujours.