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qui m’attendrit infiniment. Ce portrait m’est devenu très cher. Quiconque vient me rendre visite s’attend à voir d’abord, selon toutes probabilités, l’image d’une femme aimée. Non ! je n’en possède point d’elle. Mais je porte son âme dans mon cœur. Regarde-là qui peut ! — Bonne nuit ! —

30 Septembre.

Aujourd’hui, j’ai passé par bien des émotions. J’ai appris l’anxiété à mon sujet de ceux qui me sont chers ; avec cela une belle lettre. J’ai répondu tant bien que mal, triste et gai à la fois comme je l’étais vraiment.[1]

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Mon ancienne horreur des mariages précoces m’est revenue ; sauf dans le cas de personnes absolument indifférentes, je n’en ai vu aucun qui, à la longue, n’aboutît pas à une mésintelligence profonde. Quelle misère alors ! Ame, caractère, talent, tout doit périr, à moins que des conjonctures extraordinaires, et encore très douloureuses, n’interviennent. Ainsi tout est misère autour de moi : ce qui représente quelque chose, souffrant et abandonné ; l’insignifiance seule veut absolument se réjouir d’exister. Mais qu’importe tout cela à la nature ? Celle-ci poursuit ses fins aveuglément, ne s’occupe que de

  1. Comparer la lettre à Madame Wille, du 30 Septembre 1858.
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