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du grand Mogol.

bain plus ſouvent ; il commanda fort ſeverement qu’on mît le feu à l’heure même ſous la chaudière, & ne voulut point partir de là que les Eunuques ne lui euſſent fait comprendre que le miſerable étoit expedié. Quelque temps apres elle prit d’autres meſures. Elle fit ſon Kane-Saman, qui eſt ce que nous dirions Homme d’affaires ou Maître d’hoſtel, un Perſan nommé Nazerkan ; c’étoit un jeune Omrah le mieux fait & le plus accompli de toute la Cour, qui avoit du cœur & de l’ambition, mais qui ne laiſſoit pas de ſe faire aimer de tout le monde, juſques là que Chah-Heftkan qui etoit oncle d’Aureng-Zebe propoſa de le marier avec la Princeſſe ; mais Chah-Jehan receut fort mal cette propoſition, & même, comme on lui découvrit une partie des intrigues ſecretes qui s’étoient faites, il reſolut & ne tarda guere de ſe défaire de Nazer-kan ; il lui preſenta, comme par honneur, un Betlai, qu’il fut honêtement obligé de macher à l’heure même, ſelon la coûtume du pays. Betlai eſt un petit paquet compoſe de feuilles fort delicates, & de quelques autres choſes avec un peu de chaux de coquilles de mer, ce qui rend la bouche & les levres vermeilles, & rend

l’ha-