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air satisfait, la bûcher, et, après avoir embrassé le cadavre, elle se laissa réduire en cendre avec lui. Le bûcher de cette jeune femme étoit de bois de sandal, et avoit coûté, dit-on, sept mille florins de Hollande.

Les femmes du Bengale s’imaginent qu’en s’offrant ainsi en sacrifice, elles jouiront dans l’autre monde avec leurs maris de tous les plaisirs des sens : cette idée les anime à se livrer avec joie à une mort affreuse.

Voici comment on enterre les femmes toutes vivantes. On creuse une fosse de six pieds en carré, dans laquelle on pose sur le dos le corps du défunt, après qu’il a été lavé dans le Gange. La femme, après s’être purifiée pareillement dans les eaux de ce fleuve et s’être préparée à son sort, saute dans la fosse et se couche à côté de son mari, qu’elle serre dans ses bras ; au même instant on comble la fosse et on en foule la terre avec les pieds ; de sorte qu’elle se trouve étouffée sur-le-champ. Cette cérémonie s’exécute de même au tintamare des instrumens et des hurlemens des spectateurs.

La maladie qui règne le plus ici c’est la dyssenterie, qu’il faut attribuer aux alimens insipides et peu substantiels dont on se nourrit. On y est fort sujet aussi à des enflures aux jam-