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ses amies, ou bien à quelqu’un des spectateurs, qui le lui demandoit, et le serroit ensuite précieusement dans un linge comme une chose sacrée.

Elle paroissoit la plupart du tems plongée dans une profonde réflexion ; mais son visage n’annonçoit cependant aucune crainte, tandis que ses parentes et ses amies l’entretenoient du bonheur dont elle alloit jouir bientôt dans un autre monde. Outre ces femmes, il y avoit aussi quelques hommes de ses parens et des bramines qui, de tems à autre, jouoient sur des tambourins et des crotales, que les femmes accompagnoient de leurs chants, ou plutôt de leurs hurlemens ; de sorte qu’il étoit impossible de s’entendre. Tout cela dura jusque vers les dix heures et demie, que l’on commença à préparer le bûcher, à environ huit pieds de distance de l’endroit où étoit assise la pauvre victime, qui regardoit tous ces apprêts d’un œil aussi indifférent que si elle n’en eût pas été l’objet immédiat.

Le bûcher fut composé de quatre grands poteaux de bambous verts posés en carré à la distance de six pieds l’un de l’autre, et sortant de cinq pieds hors de terre. Entre ces poteaux on mit une planche de bois, fort sec pour qu’elle put prendre facilement feu : des-