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neur dont on accable celles qui se refusent à ce sacrifice.

Le 25 novembre, je fus le témoin oculaire d’une pareille cérémonie barbare qui se fit sur les bords du Gange, à peu de distance de Chinsura. Nous y trouvâmes le corps du mari étendu sur un kadel, espèce de lit de repos, et couvert d’un drap de toile de coton, sur lequel on avoit jonché des feuilles d’arec ou de bétel.

La femme qui devoit servir de victime étoit assise sur le lit aux pieds de son mari, avec les jambes croisées dessous son corps, et le visage tourné vers celui du défunt, qui n’étoit pas couvert. Il paroissoit avoir été un homme d’environ cinquante ans ; la femme pouvoit en avoir trente. Elle étoit vêtue d’une robe de toile de coton jaune ; ses bras et ses mains étoient ornés de bracelets et de bagues de chanclos ; ses cheveux, qui flottoient autour de sa tête, étoient couverts de bois de sandal ; de sa main droite elle tenoit une petite branche verte avec laquelle elle écartoit les mouches du cadavre. Autour d’elle étoient assises par terre dix ou douze femmes, qui lui présentoient du bétel frais, dont sa bouche étoit toujours remplie ; et quand elle l’avoit mâché à moitié, elle le donnoit à une de