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nourrissent dans l’occasion de sa queue, mais il faut pour cela qu’on la foule pendant quelque tems sous les pieds, jusqu’à ce qu’il s’en élève une légère écume. Le requin est, comme on le sait, fort vorace, et avale indistinctement tout ce qui se présente à lui. Sa proie lui échapperoit rarement, s’il n’avoit pas beaucoup de difficulté à s’en saisir, à cause que l’ouverture de sa gueule se trouve par dessous, le haut de son museau dépassant de huit à dix pouces sa gueule qui est fort grande, fort large et garnie de trois rangées de dents, qui s’engrainent les unes dans les autres. J’ai vu fourer dans la gueule d’un de ces animaux un pied de chèvre de fer, sur lequel on appercevoit distinctement les marques qu’y avoient laissé ses dents. Sa plus grande force est dans sa queue, avec laquelle il frappe l’eau de manière à la faire écumer ; et lorsqu’on l’a tiré à bord du vaisseau, il faut avoir grand soin de l’éviter, pour ne pas avoir les jambes ou les bras cassés. Sa peau est fort rude et piquante, sur-tout quand elle est sèche. Le dos et les flancs sont d’un vert sale. Lorsque le requin approche de sa proie, il se place dessous, et se tournant sur le dos, à cause de la position de sa gueule, il s’en saisit avidemment et l’avale sur-le-champ toute