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à l’instant, sans plume ni papier, les calculs les plus compliqués, et qui prendroient beaucoup de tems à un Européen. Leur écriture va de gauche à droite ; ils se servent pour tracer leurs caractères d’un petit roseau fendu. Ils ont un alphabet particulier qui diffère de celui des Persans et des Mores.

Ils sont tous, sans exception, lâches et poltrons, de sorte qu’un seul Européen peut faire tête à cinquante Bengalois ; ils tremblent à la première menace, et prennent la fuite avec effroi ; ce qu’il faut attribuer en grande partie à leurs principes religieux, qui leur inspirent, dès l’âge le plus tendre, une invincible aversion pour toute effusion de sang.

Quoique les femmes aient le tein brun, elles sont cependant bien faites et d’une figure agréable. Elles ont un caractère déterminé, et un grand penchant pour l’amour ; aussi emploient-elles toutes sortes de ruses pour satisfaire leurs désirs, particulièrement avec les étrangers. L’état de courtisane n’imprime ici aucune tache ; il y a même des lieux autorisés où se tiennent un grand nombre de femmes publiques, dont on souffre le libertinage moyennant qu’elles paient une certaine taxe au fiscal : cette taxe est, en général, d’une demi-roupie, ou quinze sols de Hollande par mois.