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la terre ; il poussa alors des hurlemens affreux. C’est dans cet état cruel qu’il étoit condamné à attendre la mort. Il mourut le lendemain à trois heures après-midi, et dut cette courte durée de ses souffrances à une petite pluie qui tomba pendant une heure. Il expira quelque tems après.

On a vu à Batavia des criminels qui, dans la saison de sécheresse, ont resté ainsi empalés pendant huit jours et plus même, sans prendre la moindre nourriture (ce que la garde empêche), jusqu’à ce qu’une pluie vienne heureusement terminer leur supplice. Un chirurgien de Batavia m’a dit que dans cette exécution on n’attaque aucune des parties vitales, ce qui la rend plus affreuse ; mais que la moindre pluie qui vient à humecter les plaies y occasionne sur-le-champ la gangrène, laquelle attaque bientôt les parties nobles et cause la mort.

Le malheureux patient dont je viens de parler ne cessoit de se plaindre de la soif ardente qui le dévoroit, et qui est particulière à ce genre de supplice ; il étoit de plus exposé aux rayons d’un soleil brûlant, et tourmenté par un essaim d’insectes dévorans. Trois heures avant sa mort je fus le voir, et le trouvai qu’il parloit avec les spectateurs. Il leur contoit