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librement sa pensée, sans avoir égard au gouverneur ni aux personnes de considération qui se trouvoient à table. Tel est le véritable esprit de liberté qui accompagne par-tout les Anglois ; bien différens en cela de ce qui se passe dans les sociétés guindées et maussades de Batavia, tant chez le gouverneur-général que chez les membres du conseil des Indes. Je ne pense pas non plus qu’un Anglois pourroit se soumettre à l’insupportable orgueil avec lequel les employés de la Compagnie hollandoise sont traités par leurs chefs, tant à Batavia qu’aux factoreries extérieures. Heureux encore si cette morgue asiatique n’avoit pas passé des Indes dans un pays où ce vice contraste depuis long-tems d’une manière si cruelle avec le caractère et les principes d’un peuple qui connoît et ses droits et son indépendance. Aussi faut-il avouer que ces employés, loin de prendre à cœur les intérêts de la Compagnie, ne cherchent qu’à faire promptement fortune, pour se soustraire au pouvoir arbitraire de leurs chefs, contre l’autorité illimitée desquels ils ne peuvent ni n’osent faire la moindre réclamation.

À six heures du soir, M. Cartier vint prendre le directeur V… et sa compagnie, et nous conduisit tous à sa maison de campagne