sources, la langue de l’immortel Saavedra reflète à merveille les teintes physionomiques du caractère national : tout à la fois grave et sonore comme celle de l’orateur romain, et naïve comme un patois visigoth, elle imite la pompe et la féerie du dialecte mauresque, avec ses aspirations et ses gutturales empruntées à l’âpreté du désert. Le Castillan, affranchi de son esclavage héréditaire par le fédéralisme pyrénéen et la religion du Christ, a retenu du Celtibère la sobriété et les goûts simples ; du Romain oppresseur, la fierté ; du Visigoth, l’instinct d’une valeur sauvage ; du Maure, son génie exalté, contemplatif, sa jalousie effrénée dans l’amour, et la perfidie de ses vengeances. Il faut ajouter à ces impressions générales celle que produit, sur l’étranger, l’aspect d’une terre naturellement fertile, mais inculte, clair-semée de rares villages et de villes pauvres, où végète une population tarie à sa source par le libertinage et la misère. Là, sous le plus beau des soleils, l’homme dort accroupi dans l’ignorance ; là, rien de social et de vivant,
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VOYAGE EN NAVARRE.