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l'homme qui n'envisage que le mal présent, s'est lassé de voir son bienfaiteur, & malgré toutes les défenses, on tue tous les jours beaucoup de martins.

L'île de France fût & fera toujours funeste aux établissemens que les Français auront dans l'Inde. On croit qu'elle est le centre de leur commerce, & que les troupes qu'on y entrepose peuvent en tems de guerre donner un prompt secours à nos comptoirs ; mais on sait qu'il faut quatre mois pour porter les nouvelles & les ordres à l'île de France : quelque diligence qu'on mette dans les opérations antérieures à l'embarquement, il s'en écoule encore huit autres, aussi ce n'est qu'après une année que toutes les escadres envoyées dans l'Inde, font parvenues à leur destination. Les Anglais au contraire ont les nouvelles en soixante-dix jours ; maîtres de l'Inde, ils s'y trouvent avec des forces considérables, & chassent entièrement les Français avant même qu'on toit instruit de la guerre à l'île de France. Pour se soutenir dans cette riche contrée, il faut nécessairement un port à la côte de Malabar, d'où nos escadres puissent observer en tout tems celles des ennemis : on fait que deux fois on n'a dû la perte de Pondichéry qu'à l'abandon des escadres qui quittèrent la côte de Coromandel pour revenir à l'île de France.

Si l'on avoit entretenu dans l'Inde les troupes qn'on a jusquà ce jour envoyées dans cette île, quoique mieux nourries & mieux habillées, elles auroient infiniment moins coûté ; d'ailleurs elles s'y seroient trouvé portées & aclimatées dans les momens utiles ; & si avec leur secours les Français n'avoient pas fait des conquêtes, du moins auroient-elles pu conserver leurs établissemens, & faire respecter leur pavillon. Je sens bien que