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bientôt maître de tout l’Empire. Ousankouei voulut le venger, leva des troupes, & combattit l’usurpateur. Les Tartares profitèrent de ces troubles ; leur Général s’empara de la capitale de la Chine, & mit son neveu Chun-Tchi sur le trône.

Trente mille Barmans détruisirent il y a peu de tems une armée de cent mille Chinois ; enfin tous ceux qui parviendront avec quelques forces à la Chine, s’empareront de cet Empire.

Les Chinois entendent bien le trafic, parce que ce genre de commerce ne demande pas beaucoup de génie. Ils n’ont qu’une seule monnoie de mauvais cuivre, qu’on appelle cache ; elle offre un trou quarré dans le milieu, qui sert à l’enfiler : ils ont une autre monnoie idéale qu’on nomme la Taële ; elle vaut dix masses, & 7 liv. 10 s. argent de France ; la masse vaux dix condorins, le condorin dix caches, & la cache dix hards. La taële est la base de tous les comptes.

Les Chinois sont frippons, fiers, insolens & lâches ; dix Européens armés seulement d’un bâton, en feroient fuir mille, & s’ils ne nous accordent aucune liberté, c’est parce qu’ils connoissent leur foiblesse. Nous avons paru trop empressés à commercer avec eux, ils n’ont pas manqué de s’en prévaloir ; d’ailleurs la crainte de partir sans cargaison & sans vivres, fait sacrifier jusqu’à l’honneur de sa Nation. N’est-il pas honteux pour les Anglais d’avoir été forcés de payer un Matelot, afin qu’il reçut le Chabouk à la place d’un Capitaine de leurs vaisseaux, & cela parce qu’il n’avoit pas été possible à ce dernier d’empêcher l’incendie d’un bateau Chinois. N’est-il pas encore honteux pour la Nation Française, qu’un domestique de M. Rot, Supercargue de la Compagnie, ait subi trois ans de prison à la place de son maître, qui fût encore obligé de