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VOYAGE AUX INDES

La couleur blanche étant celle du deuil chez les Chinois, & la noire représentant la joie, les Européens pour se prêter à leur uSage, portent presque tous une veste de satin noir.

On distingue trois principales sectes dans l’Empire, celle des Lettrés, qui suit la doctrine de Confucius, celle de Lao-Kium, & celle de Foé, qui est la plus considérable & la plus ancienne ; les dogmes de cette dernière sont les mêmes que ceux de Vichenou, dont la métempsycose est la base.

Les Prêtres de Foé s’appellent Bonzes ; le nombre en est prodigieux, on en compte plus d’un million dans l’Empire ; ils ne vivent que d’aumônes. Semblables aux Religieux de tous les pays, ils cachent beaucoup d’orgueil & d’avidité sous l’apparence de l’abnégation & de la modestie. Ils ne sont pas méprisés comme on a voulu nous le faire accroire ; leur Chef jouit des plus grands priviléges : quand il se présente chez le Viceroi de la Province, il ne rend le salut qu’après avoir été salué par ce Seigneur, & s’assied avant lui sans en attendre l’ordre. Lorsque Foé prêcha le dogme de la métempsycose, il ne manqua pas de joindre au précepte, d’aimer les animaux, celui de chérir les Moines & de leur faire l’aumône : quoique l’union de ces deux préceptes ne soit pas tout-à-fait inconséquente, ils ne laissent pas que d’être absurdes & pernicieux l’un & l’autre.

Les Bonzes se font raser le penesé, portent une robe grise & ne se marient point : les Supérieurs se font avisés d’un stratagême fort ingénieux, tant pour obvier aux fripponneries des membres subalternes, que pour attirer des aumônes plus considérables ; ils obligent les quêteurs à porter un registre, où ceux qui font des charités au Couvent les inscrivent & les