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Ox : Je crois maître Volsius que vous raillez le pouvoir que donne cette liqueur !… Eh ! bien, buvez-en quelques gouttes et vous ne douterez plus…

Volsius : Merci, Docteur, je n’en ai pas besoin !

Georges (voulant saisir le flacon) : À moi donc ! à moi !

Volsius (lui arrêtant le bras) : Jeune homme, les vaines tentatives que je viens de citer ont pu ne pas toucher votre âme, nul ne croit en effet à ces fictions de la mythologie !… Mais ouvrez les saints livres et vous y trouverez de plus ambitieux orgueils, de plus audacieuses rebellions, de plus redoutables châtiments ! Et ceux-là bien réels, et ceux-là si terribles, que le docteur Ox lui-même, redouterait de les affronter.

Ox (avec colère) : Quels châtiments ? dites… répondez donc !

Volsius (avec douceur) : Pardon, mille pardons, docteur… je ne m’exprime… je ne parle bien, dit-on que… du bout… des doigts… je vais essayer de me faire comprendre. (Il se dirige vers l’orgue et se met au clavier.) Je vais essayer de vous montrer dans quels profonds abîmes s’engloutit un sacrilège orgueil.

Ox : Que va-t-il faire ?

Éva : Seigneur, inspirez-le… Sauvez Georges… Seigneur… Seigneur… Sauvez-nous tous.

L’orgue résonne.


2e Tableau
L’ange déchu


Le fond du salon s’est ouvert, les côtés ont disparu et on aperçoit le décor qui représente la chute de l’ange. Ox s’est d’abord reculé, mais il revient vers le fond et il regarde.

Ox : C’est la chute de l’ange.

Volsius (allant à lui) : C’est le châtiment de l’orgueil.

Ox : Vous êtes un merveilleux artiste, maître Volsius, mais l’ange déchu est glorieusement tombé, la grandeur de sa chute a illustré son nom presque autant que son audacieuse rébellion, il a conquis la gloire ! et la gloire avant tout.

Georges : Oui, oui, la gloire, la gloire !

Ox : C’est là que je te conduirai.

Volsius : Oui à la gloire, ou à la folie !

Mme de Traventhal : Folie !

Volsius : Mais il me trouvera partout sur sa route.

(Il sort avec elle.)

Ox : Allons, Georges Hatteras, prends ce flacon et bois !

(Georges boit.)

Éva (lui arrachant le flacon) : Eh ! bien, je ne t’abandonnerai pas, Georges, je partagerai ces périls (elle boit a son tour et jette le flacon).

Georges : Éva ! qu’as-tu fait ?

Ox : Elle aussi ! Eh bien, soit !

Tartelet (il ramasse le flacon) : Comment, rien qu’avec cette liqueur on pourrait… (il boit…) Allons donc.