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Un frère lui demanda ce qu’il devait faire d’un héritage qui venait de lui échoir. Pasteur lui dit de revenir trois jours après. Et, trois jours après, il lui dit : « Si tu donnes ton argent à l’Église, on le dépensera en repas ; si tu le donnes à tes parents, tu n’en auras point de récompense ; si tu le donnes aux pauvres, tu seras certain de l’avoir bien placé. Mais au reste fais ce que tu voudras, car je ne me sens pas le droit de rien décider ! » Voilà ce que nous apprend sur saint Pasteur la Vie des Pères du Désert.




CLXXIV


SAINT JEAN, ABBÉ


Jean, abbé, s’entretenant avec un autre solitaire, Épisius, qui depuis quarante ans vivait au désert, lui demanda quel profit il en avait retiré. Épisius répondit : « Depuis que je suis au désert, jamais le soleil ne m’a vu mangeant ! » Et Jean : « Ni moi en colère ! » De la même façon, comme l’évêque Épiphane nourrissait de viande le solitaire Hilarion, celui-ci lui dit : « Pardonne-moi, car depuis que j’ai revêtu cet habit, je n’ai point mangé de nourriture animale. » Et l’évêque : « Moi, depuis que j’ai revêtu cet habit, jamais j’ai permis que quelqu’un allât dormir qui avait dans son cœur un grief contre moi ; et, moi-même, jamais je ne me suis endormi en ayant au cœur un grief contre quelqu’un. » Et Hilarion : « Pardonne-moi, car tu es meilleur que moi ! »

Jean résolut un jour de ne rien faire pour lui-même, à la façon des anges, afin de se consacrer plus entièrement à Dieu, lise dépouilla, donc de son froc, sortit de sa cellule, et, pendant une semaine, resta étendu dans le désert. Mais au bout de cette semaine, mourant de faim et tout dévoré des morsures des mouches et des guêpes, il alla frapper à la porte d’un de ses frères. Et celui-ci : « Qui es-tu ? » Et lui : « Je suis Jean ! » Mais le frère : « C’est impossible ! Jean est devenu un ange, et n’est plus