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SAINT NICOLAS

de grain par vaisseau. Mais eux : « Père, nous ne l’osons pas, car notre cargaison a été mesurée à Alexandrie, et nous devons la livrer tout entière aux greniers impériaux ! » Le saint leur répondit : « Faites pourtant ce que je vous dis, et je vous promets, au nom de Dieu, que les douaniers impériaux ne trouveront aucune diminution dans votre cargaison ! » Et ces hommes firent ainsi ; et, lorsqu’ils furent arrivés à leur destination, ils livrèrent aux greniers impériaux la même quantité de grain qui avait été mesurée à Alexandrie. Ils virent le miracle, le publièrent, et glorifièrent Dieu dans la personne de son serviteur. Or le blé dont ils s’étaient dessaisis fut distribué par Nicolas suivant les besoins de chacun, et de façon si miraculeuse, que non seulement il suffit pendant deux ans à nourrir la région, mais qu’il put encore servir à d’abondantes semailles.

V. Cette région avait autrefois adoré les idoles ; et, au temps même de saint Nicolas, des paysans avaient gardé la coutume de pratiquer certains rites païens, sous un arbre consacré à Diane. Pour mettre fin à cette idolâtrie, le saint fit couper cet arbre. Alors le démon, furieux, prépara une huile contre nature qui avait la propriété de brûler dans l’eau et sur les pierres. Puis, prenant la forme d’une religieuse, il monta dans une barque, accosta des pèlerins qui naviguaient vers saint Nicolas, et leur dit : « Je regrette de ne pas pouvoir vous accompagner auprès du saint homme. Veuillez du moins, en souvenir de moi, enduire de cette huile les murs de son église et de sa maison ! » Mais voici que, la barque du démon s’étant éloignée, les pèlerins virent s’approcher d’eux une autre barque où était Nicolas. Et celui-ci leur dit : « Cette femme, que vous a-t-elle dit et que vous a-t-elle donné ? » Les pèlerins lui racontèrent ce qui s’était passé. Alors il leur dit : « Cette femme n’est pas une religieuse mais l’impudique Diane elle-même ; et, si vous en voulez une preuve, jetez son huile à la mer ! » À peine l’eurent-ils jetée qu’elle s’enflamma, ce qui prouvait bien son caractère contre nature. Et la seconde barque alors disparut ; mais, quand les pèlerins entrèrent dans