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vers lui : « Malheureux, qui donc te forçait de commencer une œuvre que tu étais incapable d’achever ? Dis-moi pourquoi tu t’es enfui avant la bataille, comment tu as succombé avant même qu’une seule flèche ait été lancée ? Malheur à moi ! Que ferai-je, liée comme je le suis à ce renégat ? » Et saint Adrien, entendant tout cela, se réjouissait dans son cœur, admirant cette femme jeune, belle et noble, avec qui il était marié depuis quatorze mois. Mais quand il la vit trop affligée, il lui dit : « Ce n’est point pour éviter le martyre que je suis venu ici, mais pour te chercher, suivant ma promesse ! » Et elle, refusant de le croire : « Voyez, comme ce traître essaie de me séduire ! Voyez comme ment ce nouveau Judas ! Éloigne-toi de moi, misérable ! Et sache que je vais me tuer, pour n’avoir plus à vivre avec toi ! » Et comme elle refusait toujours de lui ouvrir, il lui dit : « Ouvre-moi vite, car je vais devoir repartir, et tu ne me verras plus, et tu regretteras, plus tard, de ne m’avoir pas revu avant mon départ ! » Ce qu’entendant, Nathalie lui ouvrit, et, quand ils se furent longuement embrassés, ils allèrent ensemble à la prison, où Nathalie essuyait avec des linges précieux les plaies béantes des martyrs.

Quand l’empereur les fit comparaître devant lui, ils étaient tous encore si accablés de leur supplice précédent qu’ils se trouvaient incapables de marcher. On dut donc les porter comme des bêtes blessées ; seul Adrien s’avançait à pied derrière eux, les mains enchaînées. L’empereur l’ayant fait étendre sur un chevalet, Nathalie s’approcha de lui et lui dit : « Mon cher seigneur, n’aie garde de trembler en présence du supplice ! Quelques minutes de souffrance, et aussitôt après tu te réjouiras parmi les anges ! » Puis, voyant avec quel courage son mari recevait les coups, elle courut vers les autres saints pour le leur annoncer. Cependant, l’empereur défendait à Adrien de blasphémer ses dieux. Et lui : « Si je souffre tous ces tourments pour blasphémer de faux dieux, combien donc en souffriras-tu, toi, qui blasphèmes le seul Dieu véritable ? » Et Maximien : « Ce sont ces imposteurs qui t’ont enseigné de telles pa-